Après soixante années d’application, la Ve République paraît avoir atteint les objectifs qui lui étaient assignés : donner un gouvernement à la République et assurer la stabilité de l’Exécutif. Néanmoins, ces objectifs sont atteints au prix d’un affaiblissement des contre-pouvoirs institutionnels. La place centrale occupée par le pouvoir exécutif, en premier lieu par le président de la République, occulte les prérogatives accordées aux autres organes et notamment la capacité pour le Parlement de contrôler l’action du gouvernement. La faible utilisation par le Parlement de ces prérogatives de contrôle présente un risque pour l’équilibre des pouvoirs. Force est de constater qu’il existe, sous la Ve République, un « découplage » (rapport Bartolone / Winock, p. 79) entre le pouvoir et la responsabilité, dont la dialectique est pourtant au fondement du constitutionnalisme contemporain. Un tel affaiblissement de la responsabilité politique interroge à l’heure où les modalités du contrôle de l’action des gouvernants, entendus comme les personnes élues ou non élues qui participent à l’élaboration de la décision politique (pouvoir exécutif, élus locaux et nationaux, fonctionnaires), sont en pleine mutation. La défiance manifeste des citoyens à l’égard des responsables publics, illustrée par l’actualité récente et les enquêtes d’opinions, montre les lacunes du contrôle des gouvernants. Les règles et les procédures prévues échouent à maintenir une confiance minimale entre citoyens et responsables politiques. Cette situation constitue indéniablement un danger. En effet, la confiance des citoyens en ceux qui exercent le pouvoir politique est un élément central de la démocratie représentative. Le pouvoir ne peut y être exercé que s’il existe une adéquation minimale entre, d’une part, l’action et le comportement des gouvernants et, d’autre part, les attentes légitimes des citoyens à leur endroit. Se pose alors la question des moyens de parvenir à cette harmonie. La notion de contrôle sous-entend l’idée d’une responsabilité particulière des gouvernants à l’égard des citoyens. Celle-ci se manifeste par la capacité de certaines institutions et des citoyens à vérifier la manière dont le pouvoir est exercé et à influer sur l’action et la conduite des gouvernants. L’exercice légitime du pouvoir est désormais conditionné à de nouvelles exigences éthiques et déontologiques de transparence et d’exemplarité dont le respect est aujourd’hui vérifié et le cas échéant sanctionné. La place des citoyens au sein de la démocratie représentative est aussi profondément renouvelée. Les progrès de l’information et de la communication leur permettent de participer effectivement au contrôle de l’activité et du comportement des gouvernants. La notion même de responsabilité des gouvernants s’en trouve profondément transformée.
La présente journée d’étude se fixe pour objectif d’identifier les causes et les manifestations contemporaines du contrôle des gouvernants afin d’en proposer une définition actualisée. La soumission des gouvernants à un contrôle est-elle une condition nouvelle de leur légitimité ? Quelles en sont les formes, les moyens, mais aussi les limites nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de la démocratie ? Au-delà d’une approche analytique des dispositions juridiques permettant de contrôler les gouvernants en France, une telle journée a également vocation à imaginer les évolutions possibles et à proposer des solutions aux carences identifiées.
Programme
9h00 : Accueil des participants
9h15 : Ouverture de la journée
Anne Levade, Professeur de droit public, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, Président de l'Association Française de Droit Constitutionnel
Julien Padovani, Doctorant en droit public, Université d'Aix-Marseille, vice-président de la Commission de la jeune recherche
Gohar Galustian, Doctorante en droit public, Université de Montpellier, membre de la Commission
9h30 : Introduction générale : la fonction de contrôle en démocratie
Alexandre Viala, Professeur de droit public, Université de Montpellier
9h45 : Table ronde n. 1 - Le contrôle citoyen
Présidence : Dominique Rousseau, Professeur de droit public, Université Paris I Panthéon-Sorbonne
Rapport préalable : "Le contrôle citoyen en droit comparé"
Jordane Arlettaz, Professeur de droit public, Université de Montpellier
10h00 Table ronde :
Jean-Philippe Derosier, Professeur de droit public, Université de Lille
Catherine Ribot, Professeur de droit public, Université de Montpellier
Marine Fleury, Maître de conférences de droit public, Université de Picardie
Jade Meyrieu, Doctorante contractuelle, Université de Montpellier
12h30 Pause déjeuner
14h00 : Table ronde n. 2 - Le contrôle institutionnel
Présidence : Anne Levade, Professeur de droit public, Université Paris I Panthéon-Sorbonne
Rapport préalable : "Le contrôle institutionnel en droit comparé"
Audrey Bachert, Docteur en droit public, Université d'Aix-Marseille
14h30 Table Ronde :
René Dosière, Ancien député, Président de l'Observatoire de l'éthique publique
Pierre-Yves Gahdoun, Professeur de droit public, Université de Montpellier
Pascale Idoux, Professeur de droit public, Université de Montpellier
Jean-François Kerléo, Professeur de droit public, Université d'Aix-Marseille
Baptiste Javary, Doctorant en droit public, Université de Paris X-Nanterre
17h00 : Rapport de synthèse
Julien Bonnet, Professeur de droit public, Université de Montpellier
Informations : Gohar Galustian - gohar.galustian@umontpellier.fr